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Publié par VILLEVERTE

Patrice Pairault (06/09/1946 - 06/03/2016)

Patrice Pairault (06/09/1946 - 06/03/2016)

Lors des obsèques de Patrice Pairault, le 14 mars 2016 église Saint Joseph les trois piliers à Nîmes, ses deux fils ont pris la parole pour lui rendre hommage.

Leurs propos bouleversants donnaient la description de l'Homme que j'ai connu.

Avec l'autorisation de Nawal son épouse et de ses enfants, je vous propose ces textes.

Le Quartier a perdu l'une de ses bonnes âmes.

Norbert Vivès

Patrice Pairault (06/09/1946 – 06/03/2016)

Premier Texte

Voilà. Mon Pat est mort. Certains parmi vous sont restés incrédules à l’annonce de cette nouvelle : Patrice était trop grand, trop fort, trop vivant ; quelque chose clochait dans l’idée de sa mort. Pourtant croyez-moi, j’ai vu son regard se perdre et puis s’éteindre ; j’ai vu distinctement l’étincelle de la vie le quitter. Mon Pat est mort.

Je veux d’abord, avant de vous reparler de lui, vous remercier du fond de mon cœur, et aussi en son nom. Vous, sa famille et ses amis, qui l’avez compris, apprécié, aimé tel qu’il était. Et parmi vous, ceux qui l’ont accompagné et soutenu jusqu’à ses derniers instants, les mêmes en fait qui le connaissaient déjà du temps d’avant ma naissance. Jean et Claude, Claude, et Jean-Claude (non, je ne bégaie pas) : merci. Toutes les libellules du nouveau printemps veilleront désormais sur lui.

La grande affaire de Patrice – surnommé pour cela « le ministre » par ses camarades à Limoges – c’était le verbe ! Verbe haut, fort et clair. Excessif parfois, mais si souvent drôle, intelligent, clairvoyant, visionnaire même, en certains cas. Et droit comme une lame surtout, franc comme le réclamait l’antique loi des Ardennes.

La parole donc, et aussi la jeunesse : deux passions dont il avait fait son métier. Et quel autre lot que professeur aurait pu lui échoir ? Professeur de physique, d’ailleurs, c’est-à-dire la science de l’émerveillement devant la Nature, la science des réponses aux questions des enfants. Voilà de ces hasards de la vie qui en réalité n’en sont pas. De Beyrouth à Sousse, de Monastir à Nîmes, dans les amphithéâtres où sur les tables des salons, privilégiés sont les étudiants qui furent exposés à sa personnalité et à son enseignement. Et chanceux tous les enfants qui ont croisé sa route.

S’il aimait la rhétorique tout comme un ministre, ce cher Patrice, contrairement à la plupart des ministres, faisait plus encore qu’il ne disait. Il était constamment engagé dans l’action, en perpétuel mouvement. Lui-même éveillé depuis 5h du matin, il vous interceptait au saut du lit d’un « bon, qu’est-ce qu’on fait aujourd’hui ? » pas toujours bien accueilli, il faut l’avouer… Et lui faisait. Pensez à tous les arbres élagués, débités, refendus ; et pensez aux arbres plus nombreux encore qu’il aura plantés, favorisés et fait grandir. Pensez à toutes les pierres excavées et taillées, et à toutes les constructions qu’il aura dressées. Rappelez-vous sa ténacité pour se préparer, seul, et réussir ses concours ; rappelez-vous les innombrables heures consacrées à rédiger pour ses élèves des sujets, des corrections, et des supports irréprochables. Imaginez les kilomètres à bicyclette – malade déjà – pour se rendre à Saint Jacques de Compostelle, à Lourdes, à Rome.

Mais son énergie allait à l’amusement tout autant qu’au travail, et avec plus de démesure. Se rappeler Patrice, c’est se rappeler toutes les nuits de fête à danser et à rire, et autant d’hectolitres dont il les aura arrosées. Se rappeler Patrice, c’est recompter les mille lieues qu’il a parcourues en mer avec ses seules palmes, réentendre la saga des poissons qu’il a pêchés, ceux qui lui ont échappé, ou qu’il a laissé vivre. Ah ! Revoir depuis la ligne de touche ses plaquages au rugby – virils mais corrects –, refaire en sa compagnie ses parcours de golf – pas moins de deux dans la journée –, partager à nouveau ses parties de tennis – minimum quatre heures autrefois – qu’il aura continué de pratiquer jusqu’au dernier souffle, littéralement.

Patrice était vulnérable sur un point. Il ne savait pas se protéger de la duplicité, de la fourberie. Ceux qui connaissent toute son histoire se rappellent que peut-être, à la source de la maladie qui a fini par l’emporter, s’était joué un lamentable épisode de cabale qui l’avait profondément meurtri. Toute sa vie, et encore dans ses dernières semaines, il était révolté qu’on n’appelât pas un chat un chat, et Rollet un fripon.

Il est parti un peu bien jeune à mon goût, mais n’ayons pas d’amertume. Il a eu le temps d’accomplir son destin. Pour son épouse, il aura été un amant passionné et un appui indéfectible. Et comme cette confiance fut bien investie ! À nous ses deux fils, il a consacré toute l’attention, tout le temps et tout l’amour dont chaque enfant peut rêver. Il nous a légué ses valeurs, et nous lui en savons gré.

Patrice n’a pas gaspillé sa vie. Qu’il repose en paix.

Deuxième texte

Le dimanche 6 mars, mon papa est parti…
Il était fatigué, il n’avait pas dormi,
Il a décidé de rester pour de bon dans son lit.
Il était fort mon papa, c’était un costaud,
Entre le tennis, le squash, le golf, le vélo,
Toujours actif, avant la sieste ou l’apéro.
C’était mon père et mon ami, mon professeur,
Mon modèle aussi, le physicien bricoleur,
Fervent du recyclage, inventeur à ses heures.
Grand-père exceptionnel, chenapan et complice,
À faire les quatre-cents coups, mais toujours sans malice,
Il était tout ça et bien plus encore, Patrice.
Le dimanche 6 mars, mon papa est parti,
Maintenant qui sait, il fait sans doute de la physique au Paradis…

Le dimanche 6 mars, mon papa est parti…
Il avait déjà battu le cancer une fois, après un combat qui avait pris du temps, du courage, de l’énergie, de la force, et le support inconditionnel de Nawal à ses côtés, ainsi que toute sa famille et ses amis.
Quelques années plus tard, le cancer est revenu en force, et la leucémie a fini par prendre son corps dimanche dernier. Son corps, mais pas son esprit !
Il a gardé son esprit brillant jusqu’à la fin. Il a continué de partager avec nous son intelligence, sa verve, son optimisme, son amour pour la vie. Et son humour aussi.
Oui, son humour ! Pas d’amertume, mais toujours un appétit pour la vie, l’amour des siens, et une gratitude d’avoir vécu assez longtemps pour savoir qu’il avait changé tant de vies pour le mieux, et qu’il continuera de le faire à travers ses enfants et ses petits-enfants.
Son dernier conseil fut de me dire de profiter de la vie, d’être heureux, de prendre soin de ceux que j’aime, et de ne pas perdre de temps à être triste ou amer. C’était vendredi dernier, deux trop courtes journées avant son départ.
Il a eu le temps de nous dire au-revoir, de nous dire combien il nous aimait, et on a pu faire de même. Je ne sais pas s’il est mort en paix, mais je sais qu’il est parti aimant et aimé.
À vous tous ici, je veux dire : « merci ».
Merci pour lui.
Merci pour nous.
Merci.
Au-revoir Pat.

Jacques Patrice Pairault
6 septembre 1946 – 6 mars 2016
Repose en paix.

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